Soutenu par les socialistes, décrié par certains professionnels de santé, notamment par les opticiens et les chirurgiens-dentistes, le projet de loi Le Roux a été adopté par le Sénat. Ce texte permet aux mutuelles de mieux rembourser les adhérents ayant recours à des soignants membres de leurs réseaux de soins. Zoom sur les implications potentielles de cette loi qui devra repasser par l’Assemblée nationale en deuxième lecture.
Les soins dentaires, très peu remboursés par la Sécurité sociale
En 2008, environ 15 % des adultes Français déclaraient avoir renoncé à des soins médicaux au cours des 12 derniers mois pour des raisons financières. Cette attitude concertait en majorité des soins dentaires et optiques, très peu remboursés par la Sécurité sociale. Le projet de loi qui vient d’être voté au Sénat le 24 juillet 2013 vise à donner aux mutualistes les moyens de concurrencer les complémentaires (institutions de prévoyance, sociétés d’assurance). Comment ? En leur permettant de mettre en place des réseaux de soins, ce qui donnera aux mutuelles la possibilité d’être des acteurs de la négociation entre l’offre et la demande de soins. Selon les défenseurs de ce projet de loi, cette mesure améliorera l’accès et la qualité de l’offre de soins aux quelques 38 millions d’adhérents aux mutuelles, sociétés de personnes à but non-lucratif.Un article unique sème la discordeLe projet de loi comprend un alinéa unique qui complète l’article L. 112-1 du code de la mutualité : “Les mutuelles ou unions peuvent toutefois instaurer des différences dans le niveau des prestations lorsque l’assuré choisit de recourir à un professionnel de santé, un établissement de santé ou un service de santé membre d’un réseau de soins ou avec lequel les mutuelles, unions ou fédérations ont conclu un contrat comportant des obligations en matière d’offre de soins“.Traduction : les adhérents qui auront recours aux soignants membres du réseau créé par leur mutuelle seront mieux remboursés. On se doute bien, dans ces réseaux seront privilégiés les soignants pratiquant des tarifications modérées et raisonnables, ce qui contribuera à la maîtrise des dépenses de santé. Et permettra aux complémentaires santé de freiner les prix dans des secteurs de soins peu remboursés par la collectivité.Suite à la fronde des médecins, internes et biologistes, le texte avait été amendé afin d’exclure les médecins de ce dispositif. Les conventions établies entre les complémentaires et les professionnels de santé, services ou établissements ne peuvent donc pas entraîner de discrimination dans la délivrance des soins ou le remboursement. Résultat : seules les chirurgiens-dentistes, les opticiens et les audioprothésistes seront concernées, il s’agit de trois catégories de soins pour lesquelles les remboursement par l’assurance maladie sont minoritaires.Chirurgiens-dentistes et opticiens dénoncent un détricotage de l’Assurance-maladieVoté à l’Assemblée Nationale depuis novembre 2012, ce projet de loi avait fait l’objet de vives critiques, en particulier de la part de médecins libéraux, des opticiens et des chirurgiens-dentistes. Ils estimaient en effet que contrairement aux objectifs affichés, ces remboursements différenciés contribueraient à renforcer une médecine à deux vitesses et la désertification médicale. Ainsi, selon le Groupe ALL (groupement d’opticiens ayant lancé le projet “Santé Visuelle Universelle“ qui propose des verres et montures à prix bloqués) cette loi privilégie la pression économique sur la santé visuelle : “l’assuré aura le choix entre un équipement de moins bonne qualité mais avec un bon remboursement, ou un équipement de bonne qualité, sur mesure, mais un remboursement dégradé…sans qu’il soit clairement informé des vraies différences“.Syndicat représentatif des chirurgiens-dentistes, l’UJCD s’est également opposé à cette loi, “en raison du risque que son adoption ferait courir à la profession en réduisant dramatiquement son indépendance et celle des patients“. Le syndicat demande que les chirurgiens-dentistes soient exclus du dispositif comme le sont les médecins. Ces syndicats dénoncent un détricotage du système du principe même de la Sécurité sociale, au profit des mutuelles à qui l’on n’imposerait en retour aucune transparence sur leurs frais de gestion.Le texte va de nouveau passer à l’Assemblée Nationale pour une deuxième lecture.Jesus CardenasSources :
Assemblée Nationale : Proposition de loi enregistrée le 16 octobre 2012Communiqué de presse du Groupe Socialiste du Sénat du 24 juillet 2013.
Sénat : Dossier Réseaux de soins du 25 juillet 2013Synthèse de la conférence de presse du Groupe ALL Santé Visuelle Universelle du 23 juillet 2013 « Scandale annoncé pour la santé publique au cœur de l’Etat ».Click Here: All Blacks Rugby Jersey