Considéré comme l'un des plus grands chefs d'oeuvre de l'Histoire du cinéma, Jeanne Dielman, réalisé par Chantal Akerman, ressort enfin au cinéma. L'un des événements cinéphiles les plus attendus de l'année !
Jeanne Dielman, 23 quai du commerce, 1080 Bruxelles est une œuvre comme aucune autre, entouré d’une aura singulière. C’est un film qui a été très peu vu à sa sortie (31 000 entrées, en 1976), et devenu très difficile à voir légalement pendant de longues années (pour une question de droits), lui conférant donc un côté très rare, comme un trésor caché… Mais en même temps, ce film réalisé par la cinéaste belge Chantal Akerman, décédée en 2015, est loué, célébré de toutes parts par quelques uns des plus grands cinéastes en activité (Todd Haynes, Kelly Reichardt, les frères Dardenne…). Jeanne Dielman a même récemment été élu meilleur film de l’histoire du cinéma ! Vénéré mais introuvable !
Un film loué parmi les plus grands cinéastes mais devenu… invisible !
Depuis mercredi, Jeanne Dielman est de retour au cinéma, partout en France. Un événement pour les cinéphiles, à l’image, par exemple, de la ressortie de La Maman et la putain, de Jean Eustache l’année dernière, qui, au final, avait attiré plus de 30 000 curieux, malgré sa durée de 3h29. L’occasion de voir enfin sur grand écran des films qualifiés de chef d’œuvre.
Ces deux films ont en commun donc une rareté, une aura singulière et une durée XXL… Ici, 3h18. La durée du (très) long métrage Jeanne Dielman est à vrai dire un élément essentiel du film. C’est même précisément de voir le temps se dérouler ainsi qui en fait un film inoubliable. Plus qu’un film, Jeanne Dielman est une expérience, qu’il faut ressentir dans sa durée.
Jeanne Dielman 23, Quai Du Commerce, 1080 Bruxelles
Sortie :
21 janvier 1976
|
3h 18min
De
Chantal Akerman
Avec
Delphine Seyrig,
Jacques Doniol-Valcroze,
Henri Storck
Spectateurs
3,6
louer ou acheter
Jeanne Dielman met en scène le quotidien d’une mère de famille qui se livre occasionnellement à la prostitution. Le film va prendre le temps de montrer tous ces faits et gestes du quotidien. Chantal Akerman filme t-elle la banalité ? Les détracteurs diront que oui, trouvant le film interminable, ennuyant, assommant même. Mais de penser cela, c’est passer totalement à côté du travail de mise en scène de Chantal Akerman… “Il y a une tension qui se crée parce que souterrainement on sent qu’il va arriver quelque chose. C’est comme une tragédie antique, avec rien, presque rien…” Chantal Akerman décrivait ce travail de tension ainsi.
Très loin d’un certain cinéma actuel, qui va dans la surenchère d’effets spéciaux, qui multiplie les plans, ici l’effet spécial est de voir Delphine Seyrig dans l’un des plus grands rôles de sa carrière, exécutant des tâches du quotidien. “Il fallait quelqu’un qu’on a pas l’habitude de voir faire la vaisselle, c’était donc parfait avec Delphine parce que tout devenait visible“, résume Chantal Akerman. Cette idée fonctionne à plein, créant un décalage certain.
Chantal Akerman en disait un peu plus, dans un entretien accordé en 1976, sur sa volonté derrière ses idées de mise en scène : “Il ne s’agissait pas pour moi de faire un film naturaliste, où il n’y a aucun geste en trop, aucun parasite, le personnage devient le reflet juste de mille autres Dielman sans être vraiment aucune d’elles. Et toute la mise en scène va dans le même sens, c’est pour cela, les plans fixes, le découpage stylisé de l’espace, la caméra face aux personnages (que le personnage soit de face ou de dos.) L’acharnement minutieux à cerner chacun des gestes pour, comme dans la peinture hyper réaliste, donner une valeur exemplaire à ce qui est montré, pour dépasser l’anecdote, le sujet, et en découvrir la vérité profonde, si j’ose dire.“
Et d’ajouter : “Je ne pense pas qu’un homme aurait abordé ce thème en montrant la vie quotidienne d’une femme au foyer; il ne se serait pas attaché aux mêmes images, images qui ne sont pas valorisées cinématographiquement ou socialement, images qui le plus souvent font parties des ellipses, ou sont utilisées accessoirement pour renforcer ou faire avancer une narration. Là, non seulement elles sont dans le film, mais elles sont le film“.
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Précisons que cette ressortie de Jeanne Dielman est la première étape d’un projet plus large autour de Chantal Akerman. En 2024, les éditions Capricci dévoileront une rétrospective en salles, un coffret DVD/Blu-ray, puis une exposition dans un musée parisien. Signalons par ailleurs la sortie récente d’un livre, toujours chez Capricci, consacré à Delphine Seyrig, DELPHINE SEYRIG, EN CONSTRUCTIONS de Jean-Marc Lalanne.
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